La crise sanitaire a touché tous les secteurs et celui des médias n’a pas été épargné. Pour les soutenir, le Gouvernement a mis sur pieds un plan d’aide, faisons ensemble le point sur la mise en œuvre des différentes mesures.
Question orale de Sabine Roberty du 8/09/20 à Bénédicte Linard, Vice-présidente du gouvernement et ministre de l’Enfance, de la Santé, de la Culture, des Médias et des Droits des femmes (Question jointe à la question de Monsieur Dispa sur l’audit sur le marché publicitaire belge francophone)
Mes collègues et moi-même avons eu, à maintes reprises, l’occasion de répéter cette phrase : la crise a frappé fort. Elle a touché l’ensemble des secteurs et celui des médias n’a pas été épargné. Alors qu’ils étaient en première ligne et jouaient un rôle primordial, ils ont accusé d’importantes pertes financières, notamment en raison de la baisse des revenus publicitaires. La crise a, une nouvelle fois, mis en lumière la trop forte dépendance du secteur à la publicité. Or, l’indépendance des médias est un enjeu majeur pour assurer leur pérennité et le pluralisme nécessaire à notre démocratie.
Pour rappel, en soutien au secteur, le gouvernement a adopté un plan d’aide le 30 avril dernier. Parmi les mesures mises en place figure l’achat d’espace publicitaire alloué à des campagnes institutionnelles pour un montant de 1 383 043 euros, l’enveloppe de trois millions d’euros destinés aux médias dont la viabilité était menacée par la crise et une mesure directement destinée à soutenir les journalistes indépendants et les statuts assimilés à travers une augmentation des moyens consacrés au fonds pour le journalisme d’investigation.
Madame la Ministre, pouvez-vous faire le point sur le développement de ces différentes mesures ? Quelles sont les modalités plus précises qui ont encadré l’achat des espaces publicitaires ? Pour ce qui est de l’enveloppe des trois millions d’euros, combien de demandes ont été introduites ? L’enveloppe a-t-elle pu couvrir l’ensemble des demandes ? L’administration devait soumettre son analyse à votre gouvernement le 20 juillet dernier. Le calendrier a-t-il été maintenu ? Les aides ont-elles été versées aux différents médias ?
Enfin, la crise ayant agi comme un révélateur de difficultés structurelles du secteur, le plan d’aide prévoit le lancement de l’audit du marché publicitaire francophone. Cette mesure a pour objectif de créer une transition vers un modèle médiatique économiquement moins dépendant de la publicité. Le 14 mai dernier, la réalisation de cet audit était établie. Pouvez-vous revenir sur les grandes lignes arrêtées pour ce cahier des charges ? L’opérateur a-t-il, aujourd’hui, été sélectionné ? Un calendrier a-t-il été déterminé ? Disposez-vous de plus amples informations sur le coût de ce projet ?
Réponse de Bénédicte Linard, Vice-présidente du gouvernement et ministre de l’Enfance, de la Santé, de la Culture, des Médias et des Droits des femmes
Le marché relatif à l’audit du marché publicitaire belge francophone a été passé dans le cadre de la procédure la plus ouverte et la plus transparente qu’organise la législation en vigueur, à savoir la procédure dite «ouverte avec publicité européenne». Loin d’avoir été réservé à un opérateur «prédésigné», ce marché est, en vertu de cette procédure, ouvert à tout opérateur situé sur le territoire de l’Union européenne pouvant présenter une offre: soit seul, en se référant, si besoin est, à d’autres prestataires pour rencontrer l’ensemble des compétences requises par le marché; soit en déléguant une partie des prestations requises à un ou plusieurs sous-traitants; soit encore sous la forme d’un groupement d’opérateurs ou d’un consortium qui auraient fait le choix de présenter une offre commune en alliant leurs compétences.
Les conditions de marché, quelles qu’elles soient, ne peuvent dès lors faire obstacle à la faculté dont disposent les soumissionnaires de présenter une offre en s’adjoignant l’expérience et les compétences d’autres opérateurs. Il est aberrant de prétendre que ce marché n’aurait été réservé qu’à un opérateur «prédésigné» ou à l’un des «Big Four» en raison des conditions de marché.
Les conditions du marché public figurent dans le cahier des charges qui a fait l’objet d’une publication officielle nationale et européenne. Sa rédaction a été soumise à la Direction des marchés publics et des achats du ministère de la Communauté française et à l’Inspection des finances, dont les remarques, portant notamment sur les conditions du marché, ont été pleinement intégrées. L’Inspection des finances a d’ailleurs émis un avis positif sur la version finale de ce projet qui a ensuite été examiné et approuvé par le gouvernement en sa séance du 20 mai 2020.
Les conditions de ce marché sont à la mesure des prestations attendues s’agissant d’une étude approfondie du marché publicitaire couvrant l’ensemble des médias de la presse écrite et de l’audiovisuel, leur évolution, leurs perspectives et les recommandations à formuler afin de renforcer le secteur.
Outre la preuve d’une assurance «risques professionnels» d’au minimum 500 000 euros, le soumissionnaire était invité à présenter une liste de trois dossiers qui ont été réalisés au cours des trois dernières années en rapport avec l’objet du marché et dont la valeur minimale devait atteindre 150 000 euros. La composition des équipes devait également répondre aux spécificités du marché, avec au moins un cadre spécialisé en analyse de marché, un cadre spécialisé en politique économique et un cadre disposant d’une formation en innovation et management stratégique. Deux soumissionnaires ont remis une offre et le marché est en passe d’être attribué.
Je reviens vers vous, Madame Roberty, pour ce qui est des modalités d’achat d’espaces publicitaires. L’objectif de cette mesure est d’aider l’ensemble du secteur des médias, sans mise à l’écart. Le gouvernement a veillé, dans le cahier des charges lié à la désignation de l’agence de communication, à éviter toute déperdition de deniers publics dans des surcoûts que pourrait causer l’intervention d’intermédiaires commerciaux de type régie publicitaire. Une enveloppe totale de 1 383 043 euros est prévue. Elle comprend les coûts des espaces publicitaires à acquérir ainsi que les frais de l’agence de communication, soit au maximum 60 000 euros. L’aide nette aux médias, frais d’agence exclus, par l’intermédiaire de l’acquisition des espaces publicitaires sera donc au minimum de 1 320 000 euros.
Enfin, s’agissant de l’enveloppe de 3 millions d’euros, à partir des critères définis dans l’arrêté du gouvernement de la Communauté française du 20 mai 2020 de pouvoirs spéciaux no 13 relatif au soutien du secteur des médias dans le cadre de la crise sanitaire du Covid-19 et des analyses de l’administration du Service général de l’audiovisuel et des médias (SGAM) et de l’Inspection de la culture, une enveloppe de 1 551 000 euros a été répartie entre les douze dossiers jugés recevables pour la presse écrite. En radio, une enveloppe de 683 363 euros a été répartie entre les 33 dossiers recevables. Pour les services télévisuels, une enveloppe de 759 089,16 euros a été répartie entre les quatorze dossiers jugés recevables, en ce compris ceux des télévisions locales et de LN24.
Les arrêtés de subventionnement ont été adoptés par le gouvernement en sa séance du 17 juillet 2020. Le versement des premières tranches est en cours.