Flore invasive : comment limiter sa propagation ?

Question orale du 29 juillet 2022 de Sabine ROBERTY à
à TELLIER Céline, Ministre de l’Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal

En vue de limiter la propagation des espèces déjà présentes, et de surveiller les espèces à risque, des mesures doivent être planifiées.

Parmi celles-ci figure l’exécution coordonnée du Règlement européen sur les espèces exotiques envahissantes (EEE).

À ce sujet, la Belgique avait été mise en demeure par la Commission européenne, avec 14 autres États membres, car elle n’avait pas été en mesure d’identifier les voies d’introduction et de propagation des espèces définies comme préoccupantes pour l’Union, elle n’avait dès lors pas non plus pu élaborer les plans d’actions nécessaires pour s’attaquer à ces voies d’introduction. Un délai supplémentaire a été accordé par la Commission jusqu’au 11 juillet 2022.

Une première version de ces plans a pu être établie et devait alors être soumise à enquête publique. Madame la Ministre peut-elle faire le point sur ce dossier ? Les plans ont-ils pu être adoptés par la Conférence interministérielle de l’Environnement ? Ont-ils été approuvés par la Commission européenne ?

Toujours dans le cadre de la lutte contre les espèces exotiques envahissantes, peut-elle également faire le point sur le suivi du projet Life Riparias ?

Réponse de TELLIER Céline, Ministre de l’Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal

En réponse à la mise en demeure de la Commission européenne concernant l’absence d’élaboration de plan d’action visant les voies d’introduction et de propagation non-intentionnelles des espèces exotiques envahissantes du règlement européen en la matière, la Belgique a transmis le 7 juillet 2022 un plan d’action national à la Commission européenne. Ce plan d’action a été validé en Conférence Interministérielle de l’environnement en date du 23 juin 2022. Le plan d’action comprend trois volets d’actions thématiques principales :

·        l’introduction et la propagation d’espèces exotiques envahissantes par détention à des fins privées et publiques ;

·        l’introduction et la propagation d’espèces exotiques envahissantes via l’exercice d’activités récréatives et professionnelles dans les milieux d’eau douce ;

·        l’introduction et la propagation d’espèces exotiques envahissantes via le transport de matériel d’habitat (sol et autres matériaux de couverture du sol), de substrats de pépinières et via les machines.

Suite à l’introduction de ce plan, aucun retour de la Commission n’a été réalisé, ce qui s’explique probablement par le fait que de nombreux états membres étaient soumis à la même procédure, et que la commission a donc un grand nombre de dossiers à vérifier.

Il convient maintenant à la Belgique et pour partie à la Région wallonne de mettre en œuvre le plan de gestion proposé. Certaines actions ont déjà été lancées à l’initiative du secrétariat scientifique national et le comité national des espèces exotiques envahissantes travaille actuellement à définir les moyens qui pourraient être mutualisés pour assurer sa mise en œuvre. Celui-ci sera d’ailleurs soutenu par la Région wallonne dans le cadre de ses missions.

Concernant le projet Life Riparias, les premiers mois ont été consacrés principalement aux inventaires de terrains, réalisés en Wallonie via les agents des contrats de rivière, ainsi qu’à l’élaboration d’outils de formation et de communication.

C’est ainsi qu’en 2021 l’ensemble des sites connus de la Berce du Caucase ont pu être revisités et les populations de plantes aquatiques de près de 300 étangs, tant privés que publics, ont été inventoriées. Plus de 80 sites ont été visités pour y vérifier la présence de la Balsamine de l’Himalaya et enfin la vallée du Hain a fait l’objet d’un recensement des écrevisses présentes.

Suite à ces découvertes, les agents de l’administration ont pu procéder à l’éradication rapide de 2 populations de Lysichiton americanus, une plante herbacée vivace encore peu répandue, dont la gestion précoce peut empêcher sa diffusion sur notre territoire. Une population de Crassula helmsii, une plante aquatique formant un tapis dense sur l’eau et impactant négativement tout l’écosystème aquatique a également pu être gérée.

Pour augmenter encore la détection des espèces exotiques envahissantes émergentes sur le terrain, les contrats de rivière ont organisé des formations et des excursions à la reconnaissance des plantes aquatiques envahissantes, à destination des naturalistes et des gestionnaires de terrain. Ces formations ont rencontré beaucoup de succès et d’autres seront proposées les prochaines années.

En 2022, le contrat de rivière Senne a organisé un « Bioblitz », soit un recensement des espèces de l’ancien canal Charleroi-Bruxelles et ce en collaboration avec les LIFE Bellini et RIPARIAS. L’importance de la détection précoce des espèces exotiques envahissantes et de l’encodage des données sur les portails d’encodage y était mise en avant. Cet événement s’est inscrit dans une série de bioblitz européens sur les espèces exotiques envahissantes.

Actuellement, les équipes des contrats de rivière sont encore sur le terrain afin d’affiner les cartes de distribution de chacune des espèces du projet. En plus de la validation des données historiques connues, des nouvelles populations d’espèces problématiques sont encore régulièrement trouvées. Pour les aider dans leur travail d’inventaire, un portail de visualisation rassemblant plus de 40 bases de données a été lancé au printemps 2022.

Afin de valoriser tout le travail de prospection effectué par les équipes du LIFE, le contrat de rivière Senne est devenu « data publisher » sur GBIF (Global Biodiversity Information Facility ou Système mondial d’information sur la biodiversité), et ce, grâce au soutien de la plateforme belge pour la biodiversité.

En plus de ces actions et afin d’informer le plus grand nombre, des articles de sensibilisation à destination des propriétaires d’étangs et de mares ont été diffusés dans plusieurs journaux communaux des trois sous-bassins et via les newsletters des contrats de rivière. Les propriétaires sont encouragés à signaler la présence d’espèces de plantes aquatiques problématiques sur leurs plans d’eau.

Deux vidéos « tutoriels » ont été produites en collaboration avec l’IRSNB sur la reconnaissance des groupes d’espèces les plus difficiles, à savoir les élodées et les myriophylles.


De plus, le site Web du projet Riparias, ainsi que le Facebook et le compte Twitter sont régulièrement mis à jour. J’invite d’ailleurs l’honorable membre à s’inscrire à la newsletter du projet via le site
http://www.riparias.be.

Pour la suite, les opérations de surveillance vont bien sûr se poursuivre. De plus, dès la rentrée, les ateliers pour la co-construction de plans de gestion communs à l’échelle de chaque bassin versant du projet pour les espèces exotiques envahissantes seront amorcés, en collaboration avec les gestionnaires et les partenaires des trois régions.

Et à partir de 2023, suite à l’élaboration de ces plans de gestion communs, les gestions de terrain vont commencer. Mais afin d’anticiper aux mieux ce travail, les contrats de rivière ont déjà démarré des « gestions tests » en 2022 sur des sites envahis par des espèces du projet pour lesquelles nous manquons d’expérience comme la jussie ou l’hydrocotyle. En parallèle, une estimation du temps de travail nécessaire pour la gestion de la Balsamine de l’Himalaya est en cours.

Crédit photo : Photo de Chris  Tombrella : https://www.pexels.com/fr-fr/photo/lumineux-nature-ete-buisson-6749092/