Comment sensibiliser à la dépression post-partum ?

Question à Christie Morreale, Ministre de la santé :

Madame la Ministre, l’arrivée d’un bébé est aussi un chamboulement pour les parents : source de joie bien sûr, mais aussi source d’anxiété et de stress. La naissance peut avoir un impact considérable sur la santé mentale des mamans, mais aussi des coparents. Or, la dépression post-partum reste méconnue et même taboue, ce qui ne permet pas une prise en charge adéquate.

Récemment, une étude de Solidaris appelait à agir contre la dépression post-partum. D’après l’analyse publiée, 54 % des mères wallonnes et 28 % des pères d’un enfant de moins d’un an sont concernés. Ces chiffres sont édifiants.

Alors que les chiffres généralement évoqués en Belgique sont de 10 % à 15 % des femmes, ceux publiés par la mutualité rejoignent les données françaises où une politique de dépistage généralisée se met en place. Ces résultats appuient l’existence d’un chiffre noir en raison d’un sous-diagnostic du phénomène et rappellent l’importance d’instaurer un screening pour la dépression du post-partum afin d’obtenir des données statistiques nous permettant de mieux cerner le phénomène, et ce, en n’oubliant pas la question des co-parents.

Parmi les leviers d’action évoqués par Solidaris figure la nécessité de mieux sensibiliser et informer sur cette question. Cette sensibilisation doit également être tournée vers les professionnels de soins entre qui les collaborations dans le domaine doivent aussi être renforcées. Enfin, les centres de planning familial peuvent également jouer un rôle pour assurer un meilleur accompagnement.

La mesure 40 du plan Genre vise à sensibiliser et informer les praticiens et patients aux maladies spécifiquement féminines. Qu’avez-vous mis en place pour rencontrer cet objectif durant cette législature ?

D’autres mesures ont-elles été prises pour informer les acteurs de la première ligne aux spécificités du post- partum, qui est la période qui suit l’accouchement, et de la dépression du post-partum en particulier ? Comment cette question sera-t-elle intégrée dans le cadre du plan WAPPS ?

D’autres mesures ont-elles été prises pour mieux informer sur le phénomène et lutter contre les tabous qui y sont liés et contre ce silence ?

Réponse de la ministre : (réponse groupée à une autre question parlementaire)

Mesdames les Députées, la dépression post-partum est un sujet interpellant, qui représente une difficulté pour les personnes qui en sont atteintes. Pour le moment, il s’agit d’une compétence plus spécifique de l’ONE.

On trouve sur le site infosanté.be, agréé en tant qu’opérateur wallon en promotion de la santé, l’amélioration de l’accessibilité à des informations scientifiques fiables, notamment concernant la dépression du post-partum, sa fréquence, les signes de reconnaissance, la pose du diagnostic, ce qu’il est possible de faire et le rôle du médecin. Ce site relaie vers des sites d’aide plus spécialisés, comme les services de santé mentale – là, on n’est plus dans la prévention –, les centres de planning qui peuvent offrir des consultations psychologiques. Dans le cadre de son agrément et de la mesure 40, à laquelle Mme Roberty faisait référence, Infosanté travaille également sur des fiches « patients » afin d’intégrer la dimension « genre » pour les fiches pertinentes.

Nous avons aussi l’ASBL Femmes & Santé, que vous connaissez sûrement. Dans le cadre de ses missions d’opérateur en promotion de la santé et des objectifs de la mesure 40, elle sensibilise et outille les professionnels-relais aux questions d’égalité de genre et de santé des femmes.

Il y a eu refinancement des centres de planning familial, avec cette enveloppe à laquelle Mme Ryckmans faisait référence, découlant de l’accord de coopération pour la généralisation de l’EVRAS en milieu scolaire, qui a été octroyée et qui permettra aux centres de planning de faire de l’EVRAS en milieu scolaire et de déployer des moyens pour mettre en place d’autres actions plus spécifiques, notamment en augmentant leurs consultations psychologiques en fonction des besoins de la population. C’est une demande qui me revient de tous les centres de planning.

En ce qui concerne la garantie et la pérennisation du droit à l’IVG, les centres de planning jouent déjà un rôle actif. Ils diffusent l’information nécessaire. Ils déculpabilisent les femmes face à cet acte. La loi encadrant l’IVG nécessite certes encore des efforts en la matière – je plaide pour –, notamment en dépénalisant totalement l’IVG et en assouplissant les conditions d’y recourir, voire, comme la France l’a fait, en blindant les choses dans sa Constitution. C’est un beau combat qu’ils ont mené.

Globalement, nous sommes à la fin de la législature. Je pense sincèrement que ce type d’exemple montre bien l’importance que, dans la prévention, on ait un seul pôle, que cela concerne les enfants ou la prise en charge de la femme enceinte. En termes d’efficacité, cela serait plus cohérent que les compétences qui relevaient de la Fédération pour les aspects « santé » et « prévention » puissent relever d’un même groupe en termes de continuum. Même si évidemment on a bien collaboré, il n’en demeure pas moins que ce sont des institutions différentes et qu’en termes d’efficacité et de continuum, un bloc commun serait sans doute plus efficace au profit de la population wallonne.

Réplique de la députée

Je vous remercie, Madame la Ministre, pour vos réponses.

Vous avez parlé de l’ONE, et j’ai eu l’occasion de poser la question à la ministre Bénédicte Linard pas plus tard que la semaine dernière sur les compétences qui sont les siennes en matière d’ONE.

Je vois aussi des leviers d’action au sein de ce Gouvernement en matière de soutien aux mamans solos, de lutte contre les violences gynécologiques et obstétricales, de prise en charge des centres de planning familial, de la généralisation de l’EVRAS, que l’on a bien opérationnalisé, mais qu’il faut encore développer.

Il faut bien faire la différence, en termes de sensibilisation et d’information, quant à la définition de la dépression, du post-partum et du baby-blues, car il ne s’agit absolument pas de la même définition. Il faut travailler à tous les niveaux de pouvoir et à tous les échelons pour bien prendre en compte cette maladie. La dépression du post-partum est définie comme étant une maladie qui nécessite une prise en charge. C’est en cela qu’elle diffère du baby-blues.

On a des leviers d’action pour briser le silence, pour faire évoluer les connaissances et pour faire plus de sensibilisation. En tout cas, que l’on compte sur moi et sur le groupe socialiste pour continuer à en débattre les prochains mois. J’entends aussi, Madame la Ministre, que nous sommes en fin de législature et qu’il ne nous reste plus énormément de sessions de travail. C’est peut-être aussi à nous, parlementaires, de nous emparer de cette question. C’est ce que je ferai pour le groupe socialiste.

Source : Site du Parlement de Wallonie, Compte-rendu provisoire de la réunion de la commission de l’emploi, de l’action sociale et de la santé – Séance du mardi 12 mars 2024. Cette version n’engage ni le Parlement, ni les orateurs.