Question orale du
25 octobre 2022 de Sabine Roberty à Bénédicte Linard, vice-présidente du
gouvernement et ministre de l’Enfance, de la Santé, de la Culture, des Médias
et des Droits des femmes.
Nos médias jouent un rôle
considérable dans la lutte contre les stéréotypes et les discriminations. S’ils
peuvent contribuer à faire évoluer la société et œuvrer à plus d’inclusion, les
médias peuvent également être vecteurs de souffrances, voire de discriminations
lorsque les sujets qu’ils abordent ne sont pas bien traités.
Il y a quelques jours sortait une
étude intitulée «LGBTphobies, médias et société», réalisée à l’initiative de la
RTBF par la Fédération Prisme et l’ASBL Média Animation. À la demande du média
de service public, ces deux associations ont préparé la rédaction d’une
brochure qui invite les acteurs du monde médiatique à interroger leurs
habitudes éditoriales et de production lorsqu’ils traitent de ces sujets.
Aujourd’hui, nous pouvons nous
réjouir du fait que nos médias accordent une place de plus en plus importante
aux personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres, queers, intersexes et
asexuelles (LGBTQIA+).
Il y a, en outre, de réelles avancées
dans le traitement journalistique de sujets liés aux questions de genre et de
sexualité. De même, le cinéma, les séries ou encore la publicité s’éloignent
progressivement de portraits stéréotypés, voire offensants.
Pourtant, les défis restent
nombreux pour que les identités de chacun soient respectées. Si ce n’est pas
toujours de manière volontaire, la méconnaissance et le manque d’outils
conduisent encore trop souvent à des productions qui véhiculent des stéréotypes
ou de fausses informations et qui perpétuent les discriminations.
Madame la Ministre, avez-vous
pris connaissance de cette étude? Comment l’accueillez-vous? Quels leviers
pouvons-nous activer aujourd’hui pour que les personnes LGBTQIA+ soient
justement représentées ?
En ce qui concerne le monde
journalistique, la formation des professionnels des médias, présents et futurs,
est un aspect essentiel. Comment abordez-vous cette question? Avez-vous pris
des initiatives en matière de formation, comme dans le cas du traitement des
violences faites aux femmes? Avez-vous lancé une réflexion à ce sujet,
notamment avec l’Association des journalistes professionnels (AJP)? Qu’en
est-il des secteurs du cinéma, des séries ou encore de la publicité? Comment la
question est-elle abordée à travers le Plan «Diversité»?
Enfin, la question de la
représentation des personnes LGBTQIA+ au sein même des équipes éditoriales ou
de production est également centrale. Dans ce domaine, la brochure mentionnée
précédemment rappelle l’importance de mieux identifier et documenter les
discriminations concrètes auxquelles les communautés LGBTQIA+ sont confrontées
dans les entreprises médiatiques afin de garantir un cadre de travail sécurisé
pour chacun et chacune. Comment accueillez-vous cette proposition? Comptez-vous
avancer en ce sens avec les représentants du secteur?
Réponse de Bénédicte
Linard, vice-présidente du gouvernement et ministre de l’Enfance, de la Santé,
de la Culture, des Médias et des Droits des femmes.
Améliorer le traitement
médiatique des identités LGBTQIA+ est essentiel pour travailler à la réduction
des différentes discriminations et violences que vivent ces communautés.
L’étude, réalisée à l’initiative de la RTBF avec le soutien de la Direction
générale de l’égalité des chances, s’appuie sur les témoignages de personnes
directement concernées et constitue un outil solide pour accompagner les
industries médiatiques dans leur traitement des thématiques relatives aux
communautés LGBTQIA+.
Ce travail doit bien sûr
s’inscrire dans la durée. C’est pourquoi, dans le cadre du prochain contrat de
gestion de la RTBF, j’entends continuer à accompagner cette dernière dans sa
volonté de porter les dossiers liés à l’égalité et à la diversité. Je
l’encouragerai notamment à établir des objectifs précis et évaluables en termes
d’égalité et de diversité, notamment en ce qui concerne l’orientation sexuelle,
tant dans les représentations médiatiques qu’au sein même de l’organisation. Il
est en effet essentiel de prendre en compte la représentation des personnes
LGBTQIA+ au sein même des équipes éditoriales ou de production.
Il y a quelques semaines s’est
clôturé le second appel à projets de la Direction générale de l’égalité des
chances visant à lutter contre les discriminations et les violences homophobes,
biphobes et transphobes. Cet appel était notamment ouvert aux médias et à
l’audiovisuel. C’est le ministre de l’Égalité des chances, M. Daerden, qui en
assure le suivi.
J’entends aussi encourager la
RTBF à dispenser des formations en son sein sur les questions d’égalité et de
diversité.
Dans le cadre de sa convention
avec la Fédération Wallonie-Bruxelles, l’AJP a quant à elle développé Student
Alia, une plateforme en ligne destinée aux étudiantes et étudiants en
journalisme qui leur permet de s’autoévaluer et d’accéder à des ressources
utiles sur l’égalité et la diversité.
Dans le cadre du Plan
«Diversité», le Centre du cinéma et de l’audiovisuel (CCA) donne des formations
pour les professionnelles et professionnels et organise aussi des formes
régulières de monitoring et des conférences pour le secteur. La dernière
conférence consistait en une analyse des représentations transgenres à l’écran.
Dans le domaine de la publicité,
le tout récent code de conduite sur les communications commerciales sexistes
piloté par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) enjoint aux éditeurs de
rendre plus visibles les personnes LGBTQIA+ et de diversifier les
représentations d’identité de genre dans les autopromotions, jingles et
habillages d’antenne.
Action après action, je travaille
à une meilleure égalité et une meilleure diversité dans les médias. Le
traitement médiatique, la présence et le vécu des communautés LGBTQIA+ sont
inclus dans ce travail constant.
Réplique de
Sabine Roberty.
Madame la Ministre, vos
nombreuses réponses témoignent de l’intérêt que vous portez à ce sujet. C’est
un travail qui se déploie dans la durée, certes, mais c’est aussi, ici et
maintenant, qu’il faut agir. Vous comptez accompagner la RTBF pour atteindre
des objectifs précis.
Cependant, nous devons nous
intéresser aussi aux autres médias. Je reviens à ma dernière question. Je me
demande si vous seriez d’accord de travailler à l’identification et à la
documentation des discriminations subies par les personnes LGBTQIA+. C’est un
travail important à réaliser.
En effet, à cause du manque
d’informations, il est difficile de mettre des mots sur les problèmes, et ces
derniers restent invisibles aux yeux de tous.