Médias: comment garantir leur indépendance ? Le point sur l’European Media Freedom Act

Question orale du 5 juillet 2022 de Sabine ROBERTY à Bénédicte LINARD, vice-présidente du gouvernement et ministre de l’Enfance, de la Santé, de la Culture, des Médias et des Droits des femmes.

Les 27 régulateurs de l’ERGA se sont tout récemment rassemblés en présentiel sous la présidence du CSA. De gros chantiers nécessitaient en effet cette réunion : la régulation de la désinformation en Europe, la nécessaire indépendance des médias, la mise en œuvre de la loi sur les services numériques (Digital Services Act, DSA) ou encore l’élaboration d’un nouveau règlement destiné à s’affirmer face aux GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft).

Si l’approche est globale, l’échelle est européenne et les règlements seront appliqués directement, c’est-à-dire sans passer par les Parlements nationaux.

Au mois de septembre, il est prévu que la Commission présente l’EMFA, un texte ayant pour objectif de garantir aux citoyens l’indépendance des médias, avec la volonté de renforcer la base légale existante. L’EMFA permettra d’assurer que les médias sont indépendants et ne sont pas la voix de l’un ou l’autre gouvernement ou d’une entreprise qui aurait un certain contrôle sur les rédactions. Ce texte est primordial dans la mesure où, comme le souligne très justement le président du CSA, on assiste à une militarisation de l’influence médiatique, tant dans les médias traditionnels que sur les réseaux sociaux. Cela représente un réel danger pour notre démocratie.

Dès lors, Madame la Ministre, avez-vous été associée aux réflexions dans le cadre de l’élaboration de ce texte ? Quelles seraient, selon vous, ses forces et ses faiblesses ? Y a-t-il des obstacles à sa bonne application ? Quelles sont les grandes problématiques dont il doit impérativement tenir compte ? Quel est votre calendrier d’action pour assurer que ces textes soient appliqués en Fédération Wallonie-Bruxelles ?

Le DSA impliquera que chaque État membre crée un poste de coordinateur des services numériques (Digital Service Coordinator, DSC), porte d’entrée unique pour les services digitaux dans chaque pays. Chez nous, ça ne sera pas chose aisée, puisque le numérique relève de compétences que l’on retrouve à différents niveaux de pouvoir.

Quel est l’état d’avancement de vos travaux à ce sujet ? Quel est votre calendrier d’action ? Quels opérateurs avez-vous mis en relation afin de créer ce poste de DSC ? Sur la base de quels critères sera-t-il choisi ? Quel est l’état de vos travaux avec les autres niveaux de pouvoir et quelles sont les prochaines étapes planifiées ?

Réponse de Bénédicte LINARD, vice-présidente du gouvernement et ministre de l’Enfance, de la Santé, de la Culture, des Médias et des Droits des femmes.

Le texte du futur EMFA est en préparation. Madame la Députée, Monsieur le Député, vous conviendrez qu’il est compliqué de se prononcer sur un projet de texte qui n’est pas encore finalisé et dont, par conséquent, je n’ai pas pu prendre connaissance.

En outre, ne connaissant pas encore l’agenda des travaux du Parlement européen ou du Conseil de l’Union européenne, il est tout aussi impossible de prévoir aujourd’hui un calendrier. J’estime cependant qu’il convient de saluer l’existence d’un texte dont l’objectif est d’assurer l’indépendance des médias, tout particulièrement lorsqu’il s’agit de la transparence relative à la propriété des différents médias ou de la préservation de leur pluralisme. Il me semble que la Commission devra relever le défi de proposer un texte susceptible de s’articuler de manière efficace et cohérente avec le cadre législatif existant et à venir. Je pense par exemple à la directive (UE) 2018/1808 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 modifiant la directive 2010/13/UE visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels (directive «Services de médias audiovisuels»), compte tenu de l’évolution des réalités du marché. Évoquons aussi la loi sur les services numériques, ou encore le règlement portant sur la publicité politique.

Le texte final du règlement du DSA n’a pas encore été approuvé. En Belgique, les entités fédérale et fédérées devront s’entendre pour établir le partage de compétences. L’une des options possibles serait la mise en œuvre d’un accord de coopération, à l’instar de la Conférence des régulateurs du secteur des communications électroniques (CRC). Néanmoins, les travaux n’ont pas encore commencé. Il serait donc prématuré de se prononcer sur les modalités de création d’un poste de coordinateur des services numériques.

Réplique de Sabine ROBERTY

Madame la Ministre, je prends bonne note du fait que vous n’avez pas encore pris connaissance de ce texte, puisqu’il n’a pas encore été approuvé. Comme mon collègue, je m’étonne toutefois du fait qu’en tant que ministre chargée des Médias, vous n’avez pas pu travailler sur un texte important et qui va dans le bon sens. J’imagine que nous en saurons plus à la rentrée de septembre.

Crédit photo : Photo de Mike B: https://www.pexels.com/fr-fr/photo/papier-peint-numerique-elvis-presley-114820/