Question orale du 5 mai 2019 Sabine ROBERTY à Christie Morreale, Ministre de l’Emploi, de la Formation, de la Santé, de l’Action sociale, de l’Égalité des chances et des Droits des femmes .
Madame la Ministre, nous le savons, la crise peut complexifier l’accès à de nombreux soins et interventions et la pratique d’IVG n’est pas épargnée. Pourtant, il est fondamental que les femmes puissent toujours y accéder, et ce, dans les meilleures conditions possibles. Dans ce cadre très précis, la liberté de choix de la méthode d’interruption est-elle toujours possible ? Afin d’éviter les contacts répétés, le délai légal de six jours entre la première consultation et l’IVG est-il respecté ou les centres sont-ils plus souples ? Les patientes admises pour une intervention dans un centre de planning familial peuvent-elles être accompagnées ? Durant cette période de crise, un suivi psychologique est-il possible ? Nous savons que le nombre de médecins pratiquant l’IVG en centre est de plus en plus problématique, déjà en temps normal, nous l’avons déjà évoqué ensemble en commission. Vu la crise, l’accessibilité à l’IVG est-elle toujours bien assurée sur l’ensemble du territoire ? Les femmes qui le souhaitent, que ce soit pour des raisons confessionnelles ou autres, ont-elles accès à des gynécologues de sexe féminin ? Qu’en est-il des patientes qui présentent des symptômes du COVID-19 ? Peuvent-elles être prises en charge ? Un testing est-il alors possible ? Nous savons que le matériel de protection sanitaire est important. Il participe activement dans la prévention contre la maladie. Pouvez-vous nous dire si les centres disposent en suffisance du matériel indispensable à la protection du personnel et des patientes ? Aussi, afin de minimiser les contacts, les consultations pour une IVG par méthode médicamenteuse peuvent-elles faire l’objet de téléconsultations ? Enfin, lors de la dernière CIM Droits des femmes, avez-vous été informée d’autres difficultés rencontrées par les centres de planning familial ? L’accessibilité à l’IVG dans le cadre de la crise sanitaire sera-t-elle à l’ordre du jour d’une prochaine CIM Santé ou d’une CIM Droits des femmes ? Ce 28 avril dernier, en commission spéciale COVID-19, vous aviez notamment évoqué des propositions destinées à prévenir une hausse des IVG dans les prochaines semaines. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet ? J’admets que ma question orale contient plusieurs interrogations, mais je tenais à faire le point en cette période de crise. Il s’agit d’une problématique qui a également besoin de toute notre attention.
Réponse de Christie MORREALE, Ministre de l’Emploi, de la Formation, de la Santé, de l’Action sociale, de l’Égalité des chances et des Droits des femmes.
Madame la Députée, la crise sanitaire que l’on connaît peut rendre l’accès à certains soins plus difficile. Comme pour les consultations gynécologiques urgentes, la pratique des IVG est garantie dans les centres de planning familial, au nombre de 16 sur le territoire de la Wallonie, qui pratiquent l’IVG. La liberté de choix dans la méthode d’interruption de grossesse est toujours possible et les prescrits légaux concernant le délai de réflexion sont maintenus. Tous les centres respectent au mieux les souhaits des bénéficiaires et traitent chaque cas en fonction de sa situation particulière. Certaines adaptations ont dû être mises en place pour garantir au mieux la distanciation sociale. Les IVG médicamenteuses, pour les grossesses de moins de sept semaines, se réalisent de préférence au domicile de la patiente, sauf si c’est plus confortable pour elle psychologiquement de venir au centre ou bien quand il est préférable que cela ne se passe pas à la maison et qu’elle n’a pas envie de le faire savoir. Dans ces cas-là, c’est autorisé, mais sinon c’est chez elle que cela se passe. Les patientes sont invitées à se rendre seules aux centres. Les centres de planning sont à la disposition des femmes tout au long de la procédure de prise en charge, avant et après la réalisation de l’IVG. Les consultations psychologiques restent possibles parce qu’elles peuvent s’effectuer par téléphone depuis la maison ou bien au centre selon les modalités qui doivent être appliquées soit par le centre, soit en fonction du souhait de la patiente. Les centres ne déplorent pas de problèmes d’accessibilité malgré l’offre de transport en commun réduite. La liste de tous les centres de planning est disponible sur www.loveattitude.be. Avant la consultation prévue, l’équipe appelle les patientes pour s’assurer qu’elles ne présentent aucun symptôme en lien avec le virus. Si ce n’est pas le cas, on reporte le rendez-vous à deux semaines. Le testing n’est pas organisé pour les bénéficiaires puisque c’est de l’ambulatoire. C’est uniquement pour les collectivités et le résidentiel. Avec le déconfinement, tout citoyen qui présente un symptôme COVID pourra consulter son médecin généraliste afin de se voir prescrire un test sans que sa situation ne soit critique. La situation évolue donc en fonction de l’épidémie et de la disponibilité du testing. L’AViQ a déjà distribué 2 650 masques aux centres de planning qui pratiquent les IVG et un réapprovisionnement de masques chirurgicaux est en cours. La question de la santé sexuelle et reproductive sera bien à l’ordre du jour de la première CIM le 8 mai. Il s’agira notamment de prévenir le risque de pénurie de contraceptifs ou encore des pilules abortives et d’examiner l’opportunité d’en faciliter la délivrance en période de crise, et par ailleurs la pertinence de renforcer la visibilité de l’accessibilité des plannings dont certaines femmes pensent sans doute, à tort, qu’ils ne sont pas accessibles. Comme beaucoup de choses ont été fermées, elles pensent peut-être que les centres le sont aussi. J’en termine avec des chiffres qui viennent de sortir aujourd’hui en France : plus de 37 % de progression de vente des tests de grossesse depuis le début du confinement.
Réplique de Sabine ROBERTY à Christie MORREALE, Ministre de l’Emploi, de la Formation, de la Santé, de l’Action sociale, de l’Égalité des chances et des Droits des femmes.
Je tiens à remercier Mme la Ministre pour ces éléments de réponse qui traduisent une nouvelle fois son intérêt pour la thématique. Je ne sais pas si Mme la Ministre a vu l’information qui émane du Fonds des Nations unies pour la population qui signale que, si le confinement devait se prolonger de six mois, ce sont 7 millions de grossesses non désirées qui pourraient être comptabilisées à travers le monde. La crise que nous connaissons aujourd’hui favorise un recul du droit à l’avortement constaté notamment aux États-Unis. Nous devons rester particulièrement vigilants et vigilantes chez nous aussi pour garantir ce droit, car, oui, le risque de cette pandémie réside dans le fait que l’interruption volontaire de grossesse passe au second plan, et ce serait intolérable. Mais je sais que nous serons toutes et tous attentifs au sein de notre Parlement. Bises à tous de loin et de manière virtuelle, et « check du pied », comme on dit.