Les perturbateurs endocriniens sont omniprésents. Quels sont les mesures prises en Wallonie pour évaluer et limiter leur impact sur notre santé ?
Question écrite du 19/10/20 de Sabine Roberty à Céline Tellier, Ministre du bien-être animal
Les perturbateurs endocriniens sont omniprésents. Nous les retrouvons, dans l’air, dans l’eau, dans les cosmétiques, dans les produits ménagers, dans les ustensiles de cuisine ou encore dans les jouets pour enfants.
Nous sommes toutes et tous exposés quotidiennement à ces substances suspectées de provoquer, entre autres, des perturbations hormonales, des problèmes de fécondité, des cancers, une propension à l’obésité, de l’hyperactivité.
Ces substances perturbent nos corps et ont des conséquences encore plus importantes sur des publics vulnérables comme les femmes enceintes ou les enfants. Ces dernières années, les études se multiplient, avec des résultats toujours plus inquiétants qui mettent en avant un problème de santé publique majeur.
Vu la répartition des compétences dans notre pays, une collaboration doit être mise en place entre les niveaux de pouvoir et j’espère que la mise en place du Gouvernement fédéral de plein exercice permettra à Madame la Ministre d’initier ensemble une réflexion.
La Wallonie a aussi une marge de manœuvre et en 2018, le Parlement votait à l’unanimité une résolution visant à prévenir les impacts des perturbateurs endocriniens sur la santé humaine et l’environnement. Dans le cadre du Plan ENVIeS, plusieurs fiches-actions concernent aussi la question des perturbateurs endocriniens.
Madame la Ministre peut-elle faire le point sur la mise en œuvre de la résolution précitée ainsi que sur les actions du Plan ENVIeS ?
Enfin, elle a lancé le 17 janvier dernier, avec sa collègue en charge de la Santé, le biomonitoring de l’ISSeP chargé de déterminer les niveaux d’imprégnation de la population wallonne aux substances chimiques présentes dans l’environnement. Cette étude doit se dérouler sur plusieurs années.
Peut-elle déjà faire un premier point sur son déroulement ?
De quelle manière l’étude a-t-elle pu être bousculée par la crise ?
Pour quand les premiers résultats sont-ils attendus ?
Réponse du 19/11/20 de la ministre
Les perturbateurs endocriniens (PE) sont l’une des 13 catégories de substance envisagée dans le plan ENVIeS.
L’approche spécifique de cette thématique a été déclinée en 4 objectifs stratégiques, mais à l’heure actuelle seul le 4e (« Orienter les choix de consommation vers des produits ne contenant pas de PE ») a été décliné en Objectifs opérationnels.
Trois fiches actions ont ainsi été préparées, qui prévoient le renforcement de la prise en compte des enjeux de santé-environnementale dans les hôpitaux et le secteur médical (Action I-3-3), la rédaction et la diffusion de recommandations sur l’utilisation des désinfectants chez les particuliers et dans les milieux d’accueil de la petite enfance (Action I-3-4), et d’entreprendre des actions d’information sur les PE (Action I-3-5).
Cette dernière action a été activée cette année avec un projet visant à l’élaboration et à la diffusion d’un kit d’outils d’animation sur les PE ; projet mis en œuvre par l’ASBL Espace-Environnement.
Les PE font l’objet d’une attention transversale dans le plan ENVIeS. On les retrouve ainsi dans d’autres actions comme par exemple la rédaction de cahiers des charges « zéro perturbateurs endocriniens » pour les pouvoirs publics (Action I-2-7). Parmi ces fiches spécifiques, seule l’Action I-3-4, relative à l’usage des désinfectants, a pour l’instant été activée.
Certaines fiches déjà activées impliquent un suivi des PE dans l’environnement comme le projet MICROPLASTSOIL qui vise à analyser des taux de microplastiques présents dans les sols agricoles (Action I-5-5) ou encore le projet BIOSURPLA qui vise à instaurer une surveillance de la qualité de l’air intérieur dans les écoles et les crèches (et qui concerne les phtalates ; Action I-2-4).
Le projet de biomonitoring wallon BHM-Wal (correspondant à l’Action III-1-4) prend naturellement la problématique des PE en compte. Les substances qui y sont visées ont été sélectionnées dans la liste des substances prioritaires établie par le projet européen HMB4EU. Les substances prioritaires à inclure dans un biomonitoring humain et définies comme des PE avérés ou suspectés sont le bisphénol A, les polychlorobiphényles (PCB), certains hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), certains pesticides pyréthrinoïdes, l’aldrine, l’hexachlorobenzène, le chlordane et le dieldrine.
À cette liste, il convient d’ajouter des métaux lourds comme le mercure, le cadmium et le plomb.
La seconde phase du projet BMH-Wal activée cette année implique l’analyse de substances complémentaires également connues pour leurs effets PE ; à savoir, les phtalates, les parabènes, les perfluorooctanoate (PFOA) et les retardateurs de flammes bromés.
Malheureusement, le recrutement des volontaires pour ce projet a été perturbé par la crise sanitaire due à la pandémie de la Covid-19 et surtout à cause de la période de confinement qui en a résulté. Pour rappel, le recrutement prévu pour la première phase du BMH-Wal concernait des nouveau-nés, des adolescents et de jeunes adultes.
* Le recrutement des adolescents et des jeunes adultes a été initié au mois de novembre 2019 et a dû être suspendu à la mi-mars 2020. Les écoles étaient fermées et la grande majorité des employés des institutions publiques ciblées par le biomonitoring travaillaient de leur domicile. Ce recrutement n’a pu reprendre qu’à la fin du mois de mai 2020, au moment du déconfinement progressif. Le recrutement de ces deux publics cibles s’est poursuivi durant un mois et a pris fin le 18 juin.
* Le recrutement des nouveau-nés impliquait la collaboration de maternités ; une par Province. Trois des cinq maternités participantes ont atteint leur effectif de recrutement peu avant le confinement. Pour les deux dernières, l’une d’entre elles a continué à inclure de nouveaux participants durant la période de confinement, l’autre a préféré se mettre en pause compte tenu de la charge supplémentaire que la Covid-19 faisait peser sur l’ensemble du personnel soignant. Le recrutement a repris en date du 15 juin 2020 et s’est clôturé le 4 août 2020.
Le recrutement pour les autres classes d’âges envisagé pour la seconde phase du projet BMH-Wal devait débuter fin de cette année, mais risque de se trouver compromis par la période de re confinement partiel que nous connaissons actuellement.
Cette situation inédite, si l’on s’en réfère à la période de confinement que nous avons tous subie, a eu pour conséquence de décaler l’agenda, et ce, malgré l’opiniâtreté des équipes (laboratoires et ISSeP) à poursuivre leurs missions. La campagne de recrutement, plus longue qu’initialement prévue, a entrainé un délai plus long des laboratoires relatif aux mesures des substances dans l’urine et le sang.
Les résultats d’analyses ont donc été livrés avec retard (fin octobre 2020) et c’est ainsi toute la chaîne de production des valeurs de référence qui s’en est trouvée impactée.