La mobilité est l’un des
grands enjeux des prochaines décennies et en ce sens, le développement des
mobilités douces dont le vélo ne fait plus aucun doute.
Dès lors, il apparait
comme normal d’offrir un maillage plus dense de nos infrastructures routières,
continu, efficace et plus sécurisé aux cyclistes qui sont de plus en plus
nombreux à circuler sur nos routes.
Monsieur le Ministre
peut-il revenir sur les différents appels à projets qu’il a portés au sujet des
aménagements cyclables en Wallonie ?
Quelles sont les
réponses des pouvoirs locaux ?
Sont-elles à la hauteur
des objectifs qu’il s’est fixés en début de législature ?
Quelles sont les villes
et communes qui possèdent le plus de pistes cyclables aujourd’hui ?
Les dangers sur nos
routes sont encore fort présents pour les cyclistes. En effet, si chaque année
ce sont près de 35 000 accidents qui se produisent sur nos routes, les cyclistes ne
sont pas en reste puisqu’en 2021 ce sont 10 118 cyclistes blessés qui ont été référés par la police.
Que met-il en place en ce qui concerne les discontinuités d’itinéraires
(coupures urbaines) qui mettent encore trop nos cyclistes en danger ?
Comment accompagne-t-il les responsables politiques communaux en charge de la
Mobilité pour créer ensemble une politique cyclable coordonnée sur leur
territoire partagé ?
Pour faire en sorte que
les réseaux cyclables puissent être continus entre les communes et que les
utilisateurs puissent se sentir en sécurité en permanence, ne faudrait-il pas
soutenir activement l’articulation des politiques locales entre-elles ?
Compte-t-il lancer
prochainement des appels à projets qui permettraient cette meilleure
articulation ?
Ne faudrait-il pas
également travailler au niveau de chaque nouveau marché public, pour aménager
des sites propres destinés aux vélos, sur les grands axes routiers partagés ?
À ce sujet, se
concerte-t-il avec son collègue en charge des Pouvoirs locaux ?
Le décret du 4 avril 2019 vise à généraliser les aménagements cyclables de
qualité en Wallonie et à renforcer la sécurité des cyclistes. Il est notamment
précisé, à l’article 1 que « lors de travaux de réalisation,
d’aménagement ou de réfection d’une voirie régionale, le Gouvernement ou, le
cas échéant, toute autre personne morale de droit public à l’initiative de ces
travaux, garantit que cette voirie est dotée d’aménagements cyclables de
qualité, tels que définis par le Gouvernement.
Lorsque la voirie
régionale dispose d’un « haut potentiel cyclable », c’est-à-dire
qu’elle est reprise par le Schéma Directeur cyclable pour la Wallonie, ces
aménagements consistent prioritairement en la réalisation de cheminements
cyclables séparés des voitures.
L’obligation d’équiper
les voiries régionales en aménagements cyclables de qualité est effective dès
l’éventuelle phase de planification initiale des travaux. Elle s’accompagne de
la consultation des usagers cyclistes, de la Direction des déplacements doux et
des partenariats communaux ainsi que de la direction de la sécurité des
infrastructures routières du Service public de Wallonie, selon les modalités à
fixer par le Gouvernement »
Cette contrainte
est-elle respectée ?
Quelle évaluation a déjà
été réalisée en la matière notamment au regard des derniers accidents survenus
avec des cyclistes ?
Qu’en est-il également
de l’entretien des pistes cyclables ?
Possède-t-il une
évaluation de cette action nécessaire ?
Enfin, dans une optique
de transition rapide vers un mode de déplacement doux, ne serait-il pas
nécessaire d’imposer dans chaque nouveau marché public un aménagement
systématique de sites propres destinés aux vélos, sur les grands axes routiers
partagés ?
Réponse de HENRY Philippe, Ministre du
Climat, de l’Energie, de la Mobilité et des Infrastructures
Concernant les investissements en
infrastructures que j’ai portés au sujet des aménagements cyclables en
Wallonie, les budgets se répartissent entre les projets d’infrastructures
régionales, et les aides aux pouvoirs locaux pour les infrastructures communales.
Au niveau régional :
·
le Plan Mobilité et
Infrastructure Pour Tous (PMIPT), dont notamment l’enveloppe additionnelle pour
les modes actifs de 250 millions d’euros ;
·
l’enveloppe RAVeL classique dotée d’un montant
de 8 millions d’euros annuels qui alimente le Plan RAVeL de base ;
·
les
fiches « Corridors vélos et aménagements cyclables » du plan de
relance wallon (PRW) pour un total de 38,74 millions d’euros visant à renforcer
la dynamique de mise en place d’un réseau express cyclable notamment dans la
continuité des aménagements réalisés à Bruxelles et en Flandre pour relier
Bruxelles et sa périphérie.
Au niveau local :
·
l’appel à projets « Aménagement
temporaire » initié dans le contexte de la crise du COVID doté d’un
montant initial de 2,5 millions d’euros ;
·
la relance d’investissements dans le réseau
local des communes à travers l’appel à projets « Wallonie Cyclable »
de 61,2 millions d’euros (Plan d’Investissement PIWACY). À ce stade, environ
une centaine de communes sur les 116 sélectionnées ont remis à l’administration
régionale leur plan d’investissements ;
·
le lancement d’un droit de tirage pour la
mobilité active et l’intermodalité, intitulé Plan d’Investissement Mobilité
Active et Intermodalité (PIMACI) de 210 millions dont la moitié de l’enveloppe
est dédiée aux aménagements cyclables. Les communes travaillent actuellement à
l’élaboration de leur plan d’investissements sur l’ensemble du montant qui leur
sera octroyé au cours de la programmation entre 2021 et 2024.
Concernant l’utilisation effective de ces
montants, près de 21 millions ont été engagés en 2020 et 32 millions en 2021
concernant l’enveloppe additionnelle pour les modes actifs du PIMPT.
Pour l’appel à projets « Aménagement
temporaire » seul, 1,2 million d’euros a été octroyé à travers l’appel à
projets et un peu moins de 1 million d’euros a été consommé. En effet, sur les
55 communes répondant à l’appel à projets, 5 communes ont malheureusement
abandonné le subside.
Au sujet du PIWACY, les marchés de travaux dont
les projets ont été validés à ce stade sont en cours de rédaction par les
communes. Il n’est donc pas encore possible d’annoncer le nombre de kilomètres
de voies cyclables qui seront aménagées ou rénovées ni le nombre de bornes de
réparation qui seront installées.
Quant au PIMACI, ils sont actuellement en cours de
réalisation au niveau des communes.
Pour revenir aux objectifs fixés en début de
législature, je rappelle que jamais auparavant de tels moyens financiers n’ont
été mis à disposition pour développer des projets cohérents en termes
d’infrastructures cyclables. Il faut maintenant concrétiser ces projets sur le
terrain afin de répondre aux attentes et aux ambitions que nous avons. Nous ne
pouvons pas nous limiter à « peindre l’ensemble des voiries » avec
des chevrons. Il faut également oser s’interroger sur la politique du
stationnement voiture, sur les plans de circulation, ou encore sur les
limitations de vitesse, pour (re)donner de la place aux modes actifs. Dans le
cadre de l’analyse des PIMACI, mon administration sera davantage attentive à ce
que les projets puissent permettre un vrai report modal, dans le respect du
principe STOP.
Concernant les villes et communes qui possèdent
le plus de pistes cyclables aujourd’hui, nous ne disposons malheureusement pas à
l’heure actuelle ce type de données. Cependant, une cartographie est en cours à
différents niveaux :
* au niveau régional, le travail est en cours
comme on le verra plus bas dans ma réponse à une autre des questions ;
* dans le cadre du Plan d’investissement
Wallonie Cyclable, il est prévu que chaque fois qu’une nouvelle étape est
franchie dans la réalisation des aménagements, les communes doivent
géolocaliser de façon précise la zone de chantier envisagée/concernée. Pour ce
faire, tous les formulaires disponibles sur le guichet des Pouvoirs locaux
contiennent un outil de dessin. Il est également prévu que les communes
réalisent une cartographie des aménagements cyclables existants en précisant le
type d’aménagements. Celle-ci sera mise à jour régulièrement.
Par rapport à ce dernier point, il s’agit d’un
travail important pour lequel, il est essentiel d’avoir une certaine
homogénéité entre les données provenant des différents niveaux (communal,
provincial, régional, administration, bureau d’étude, citoyens…) afin de
permettre une bonne utilisation de ces données. En lien avec l’Observatoire des
Modes actifs, mon administration travail est en train de réfléchir à la
création d’un outil facilitant l’intégration et l’encodage des infrastructures
cyclables.
En ce qui concerne la discontinuité
d’itinéraires, l’honorable membre pointe un élément très important.
L’avant-projet de Décret Mobilité durable et accessibilité dont la première
lecture a été adoptée par le Gouvernement en juin de cette année, prévoit que le
Gouvernement établisse un réseau cyclable structurant wallon qui empruntera
« les voiries ou les emprises les plus adaptées du point de vue des
critères suivants : cohérence de réseau, rapidité et caractère direct de la
liaison entre deux pôles, sécurité, confort, pentes et agrément. Des
itinéraires alternatifs et des aménagements cyclables temporaires peuvent être
localement mis en place dans l’attente de l’aménagement cyclable qualitatif
définitif ».
Dans l’analyse des dossiers PIWACY et PIMACI, mon
administration est également attentive à cette continuité des aménagements.
Par ailleurs, l’accompagnement des responsables
politiques communaux en charge de la Mobilité est déjà effectif via notamment
les différents services de l’administration régionale.
La formation des Conseillers en Mobilité permet
également aux responsables politiques d’aborder les différentes thématiques
liées à la mobilité, dont la mobilité cyclable.
Dans le Plan d’action Wallonie cyclable, il est
aussi prévu la mise en place de formations à l’attention des mandataires et
agents en charge de la politique vélo, aux niveaux régional, communal et privé.
Cette formation pourra se faire en complément de la formation de Conseiller en
Mobilité de la Région wallonne.
Cela passe notamment par l’organisation de
journées de sensibilisation aux aménagements cyclables (et des visites de
terrain), compte tenu de la sécurité des usagers.
Au niveau de la planification et de la
coordination, il est prévu la réalisation d’une étude « réseau cyclable »
afin de pouvoir actualiser l’actuel Schéma directeur cyclable wallon et définir
le réseau structurant wallon. Cette étude sera pilotée par la Région. Les Plan
Communaux de Mobilité (PCM), Plan Inter-Communaux de Mobilité (PICM), Plan
Urbain de Mobilité sont aussi des outils qui permettent de définir des réseaux
cyclables cohérents dans la commune, mais aussi vers les communes limitrophes.
Certains Groupements d’Actions Locales (GAL), soutenus par la Région, aident
également à définir des réseaux supra-communaux sur leurs territoires, à
l’image du Réseau Cyclable réalisé récemment dans le Pays de Herve.
Concernant les sites propres destinés aux vélos
sur les grands axes routiers, la Région investit également sur le domaine en
faveur des modes actifs, via le PIMPT.
Afin de répondre aux demandes exprimées par les
communes suite au PIWACY, les communes ont également l’occasion de proposer des
projets sur voirie régionale. Cependant, les communes doivent rapidement
prendre contact avec la Direction des Routes concernées et devront se conformer
aux règles du SPW en la matière, notamment en ce qui concerne les audits de
sécurité des infrastructures routières.
Dernier point, les cyclostrades qui constituent
l’épine dorsale du réseau cyclable fonctionnel supra-local et qui se
concentreront sur les hauts potentiels de déplacements, se situeront tant sur
voiries régionales que communales. Les cyclostrades bénéficieront d’une
infrastructure de grande qualité permettant de se déplacer dans les meilleures
conditions de confort, de sécurité et d’efficacité sur des distances moyennes à
longues, et sur des aménagements cyclables reconnaissables.
Par rapport à la concertation avec mon collègue
Christophe Collignon sur les projets cyclables, celle-ci est réelle et s’est
concrétisée par exemple dans le cadre des droits de tirage liés au PIMACI et
Plan d’Investissement Communal (PIC). La commune peut combiner les subsides du
PIC et ceux du PIMACI. Par exemple, si une commune envisage la réfection d’une
voirie de façade à façade et que celle-ci se trouve dans son réseau piéton
et/ou cyclable, elle peut avoir recours à l’enveloppe du PIC pour la
réalisation de l’espace dédié aux véhicules automobiles (bandes de circulation
et zone de stationnement).
Elle peut utiliser l’enveloppe du PIMACI pour
la réfection des trottoirs et l’aménagement d’une piste cyclable. Pour ce
faire, le bénéficiaire prévoit dans son métré plusieurs divisions, une par
subside ou intervention financière.
La question des aménagements cyclables séparés
là où le potentiel cyclable est élevé repose quant à elle sur deux critères
principaux que sont la vitesse effective du trafic (V85) et sa densité.
Trois principes d’aménagement sont possibles :
·
la mixité (en ce compris la bande cyclable
suggérée et la rue cyclable) ;
·
la séparation visuelle (piste cyclable marquée) ;
·
la séparation physique (piste cyclable munie
d’un signal D7, D9 ou D10, chemin réservé ou partie de la voie publique
sous statut F99a ou b).
L’analyse de la pertinence et du type
aménagement cyclables est ainsi réalisée pour chaque aménagement, et donc
chaque marché public.
Enfin, la Région s’attèle à assurer une
inspection de ses infrastructures cyclables de manière à garantir leur qualité
dans le temps via un contrôle et un entretien régulier et adéquat. L’entretien
se fait de manière récurrente sur les voiries régionales. Il est cependant
connu que les interventions de nettoyage/déneigement sur les pistes cyclables
indépendantes se révèlent plus compliquées qu’au niveau des pistes cyclables adjacentes
(qui sont déneigées et nettoyées simultanément avec les voiries carrossables).
Un nettoyage plus approfondi peut être effectué par l’entrepreneur en charge du
bail d’entretien de différentes routes, mais la Région est alors dépendante de
leur planning et ces interventions se font en fonction des budgets qui y sont
alloués.
Quant à l’évaluation de cet entretien, j’ai
demandé à mon administration d’inventorier et caractériser l’état des pistes
cyclables le long des voiries régionales. Mon administration va prochainement
mener une campagne d’inspection ayant deux objectifs principaux :
·
vérifier, corriger et/ou compléter l’inventaire
des pistes cyclables sur voiries régionales, avec les données attributaires
nécessaires à la détermination de la conformité des pistes et des coûts
d’entretien et de réhabilitation ;
·
évaluer qualitativement l’état des pistes
cyclables afin de hiérarchiser les besoins et proposer par la suite les
réhabilitations des tronçons dans le moins bon état.
Crédit
photo : Photo de Bianca Gasparoto:
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